Le conflit en cours à Gaza approche de son cinquième mois, marqué par des bombardements incessants et dévastateurs.
23 février 2024
Des Palestiniens arrivent à Rafah, dans le sud de Gaza, après avoir fui une offensive terrestre et aérienne israélienne dans la ville voisine de Khan Younis, le 29 janvier 2024. (AP Photo/Fatima Shbair)
Par Mohammed Abu-Nimer
Le conflit en cours à Gaza approche de son cinquième mois, marqué par des bombardements incessants et dévastateurs. Fin janvier, le bilan de cette campagne destructrice s’élevait à plus de 25 000 morts, les deux tiers des victimes étant des femmes et des enfants. Des dizaines de milliers de maisons sont en ruines, contraignant plus de 1,5 million de Palestiniens à vivre dans des conditions de surpeuplement dans la région sud de Gaza. Du côté israélien, l’attaque du Hamas du 7 octobre a fait 1 139 morts, poussant plus de 125 000 Israéliens à fuir leurs foyers, cherchant refuge dans des hôtels ou des abris temporaires.
Ce conflit a replongé la relation israélo-palestinienne vers ses racines de 1948, ravivant des animosités profondément enracinées et des schémas de déplacement, particulièrement évidents dans la déshumanisation des Palestiniens dans le discours politique israélien et occidental. En outre, on assiste à une montée inquiétante de l’antisémitisme et de l’islamophobie à l’échelle mondiale. Notamment, la Cour internationale de Justice, à la demande de l’Afrique du Sud, a entamé des délibérations sur la question de savoir si les actions militaires et gouvernementales d’Israël constituent un génocide contre les Palestiniens, une première historique dans ce conflit de longue date.
Ni les Israéliens ni les Palestiniens ne sont en mesure de remporter une victoire claire dans ce conflit. Au lieu de cela, cela a infligé de profondes souffrances à toutes les personnes impliquées, ternissant la réputation des gouvernements européens et nord-américains pour leur double standard et leur hypocrisie politique. La gestion de ce conflit a miné la crédibilité et l’efficacité des institutions internationales et multilatérales, telles que les Nations Unies, l’Union européenne et la Ligue arabe, en tant que défenseurs des droits de l’homme et des valeurs démocratiques.
De plus, le conflit a alimenté une polarisation mondiale, certains prônant la solidarité avec la cause palestinienne et la reconnaissance de leur dignité et de leur liberté, tandis que d’autres soutiennent fermement la campagne militaire israélienne contre les Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.
Les chefs religieux se retrouvent empêtrés dans cette polarisation, nombre d’entre eux étant critiqués pour leur incapacité à adopter une position morale claire contre la guerre à Gaza. Pour être des artisans de paix efficaces, ils doivent affronter la réalité selon laquelle de nombreux musulmans considèrent les actions d’Israël comme un nettoyage ethnique et un génocide. Tout effort de rétablissement de la paix doit s’attaquer sérieusement à la tragédie morale vécue par les Palestiniens et les communautés musulmanes en solidarité avec eux, en condamnant sans équivoque le ciblage délibéré des civils, le blocus des approvisionnements essentiels, le nettoyage ethnique et la campagne génocidaire à Gaza.
Les efforts en faveur du dialogue interreligieux au Moyen-Orient et au-delà se sont heurtés au scepticisme et à la dérision, jugés futiles et manipulateurs en l’absence d’action significative pour mettre fin à la violence à Gaza.
Dans différentes traditions religieuses, notamment l’islam, le judaïsme, le christianisme, le bouddhisme et l’hindouisme, les chefs religieux et leurs communautés respectives peuvent collaborer à diverses initiatives visant à promouvoir la paix et la justice.
Un appel unifié pour la paix : les chefs religieux jouent un rôle prophétique dans la défense de la paix et de la justice. Ils peuvent s’appuyer sur le caractère sacré de la vie humaine au sein de leurs traditions religieuses pour dénoncer la violence et les conflits. Dans le contexte israélo-palestinien, ils peuvent s’unir pour réclamer un cessez-le-feu, y compris un appel interconfessionnel visant à mettre un terme à toutes les attaques contre les civils, en particulier les pertes tragiques en vies humaines à Gaza. En outre, ils peuvent exiger conjointement la libération des otages des deux côtés, en s’appuyant sur la croyance dans le caractère sacré de toute vie. Grâce à des campagnes coordonnées, ces dirigeants peuvent mobiliser leurs communautés vers la paix.
Témoigner de la vérité : Les délégations interreligieuses peuvent entreprendre des voyages à Gaza, en Cisjordanie et en Israël, servant ainsi de témoins impartiaux des réalités sur le terrain. En partageant des expériences et des histoires de première main, tant du point de vue palestinien qu’israélien, ils peuvent fournir une plateforme permettant à leurs partisans de s’engager et de répondre à ces vérités.
Aide humanitaire et secours : Le conflit à Gaza a conduit à une crise humanitaire sans précédent. Les efforts interconfessionnels peuvent se concentrer sur la fourniture d’une aide vitale et de secours à ceux qui en ont besoin. Les chefs religieux peuvent tirer parti de leurs congrégations pour soutenir les enfants et les femmes de Gaza, en mettant l’accent sur l’impératif humanitaire au-dessus des divisions politiques. En dépolitisant l’aide humanitaire, ils peuvent contribuer à combler les divisions au sein des communautés encore plus polarisées par le conflit.
Faciliter la guérison : tout au long de l’histoire, les chefs religieux ont servi de guérisseurs spirituels en période de traumatisme provoqué par la guerre.
Au lendemain du conflit à Gaza, des millions de Palestiniens et d’Israéliens ont besoin de guérison. Les dirigeants musulmans, juifs et chrétiens peuvent collaborer pour fournir une plateforme de guérison et de réconciliation, en mettant en commun les ressources de leurs communautés pour soutenir toutes les victimes, en particulier les femmes et les enfants, dans leur cheminement vers le rétablissement.
Grâce à une action collaborative fondée sur des valeurs partagées de compassion, de justice et de paix, les chefs religieux et leurs communautés peuvent servir de puissants agents de changement positif en promouvant le dialogue, la compréhension et la réconciliation au milieu des conflits et des souffrances. — Magazine Amérique
(Mohammed Abu-Nimer est titulaire de la chaire Abdul Aziz pour la paix et la résolution des conflits à l’Université américaine et président de l’Institut Salam pour la paix et la justice.)
Remarque : Il s’agit d’une version abrégée. Pour lire l’article complet, rendez-vous sur : https://bit.ly/48aNe7W